Résumé
Le Maghreb est-il, à l'instar des sociétés du Nord, saturé par la fièvre des entreprises mémorielles ? Certes, il est invité - et s'invite - en France dans les conflits résultant de l'affrontement des mémoires autour de la question coloniale. Mais la fabrique de la mémoire au Maghreb n'est pas uniquement le résultat des interactions entre le Nord et le Sud de la Méditerranée. Elle est aussi le fruit d'un « travail de mémoire » interne qui se déploie depuis les indépendances avec d'autant plus de force qu'il s'est agi pour les États de l'Afrique du Nord de construire rapidement des nations à la fois ancrées dans le passé et porteuses d'un vouloir-vivre ensemble. Comme le note Jean-Philippe Bras coordinateur de ce dossier de recherche, ce processus de production d'une mémoire nationale édifiante se heurte à l'émergence de mémoires concurrentielles qui s'inscrivent dans les conflits les plus contemporains des sociétés maghrébines. C'est aujourd'hui la nécessité de surmonter les déchirements politiques ayant affecté le tissu social qui débouche, comme le montre bien l'exemple marocain, sur l'émergence d'un nouveau « registre mémoriel » fondé, cette fois-ci, sur la conciliation et la réparation. Un débat de recherche essentiel à côté duquel on retrouve les rubriques habituelles de L'Année du Maghreb : Chroniques politiques, Gros Plans, Études thématiques, ainsi que des sujets à la pointe de l'actualité portant sur l'islamisme ou les relations Maghreb-Europe en matière de sécurité et de défense.